Impact Interview avec Behaven
Changer le comportement de vos employés pour un avenir durable avec Julia Terlet.
A Beautiful Green : Pouvez-vous nous parler de l’origine de votre agence et de ce qui vous a motivé à utiliser les sciences comportementales pour l’engagement des employés dans les démarches durables ?
Julia Terlet : La durabilité est souvent perçue à travers le prisme des nouvelles technologies, avec l’idée qu’elles nous permettront de maintenir notre mode de vie tout en réduisant notre empreinte environnementale. Cette vision est attrayante, mais elle ne suffit pas. En réalité, plus de 60 % des réductions d’émissions nécessaires reposent sur des changements de comportement. Environ 10 % concernent des actions de réduction, comme baisser le chauffage, et 50 % dépendent de comportements d’adoption, comme utiliser davantage les transports en commun. Cela montre que l’impact est avant tout entre les mains des individus. Même si la majorité des personnes savent qu’elles doivent agir, peu passent réellement à l’action. C’est ce que l’on appelle l’écart entre les intentions et les comportements. Réduire cet écart est essentiel pour rendre notre monde plus durable. C’est précisément pourquoi nous avons créé Behaven il y a quatre ans, afin d’aider les organisations à encourager l’action grâce à notre expertise en sciences comportementales et en communication.
Comment les sciences comportementales peuvent-elles être utilisées pour améliorer l’engagement des employés dans les pratiques durables ?
Pour qu’une entreprise puisse mobiliser efficacement ses employés autour des enjeux de durabilité, il est souvent nécessaire de les aider à changer leurs comportements et leurs prises de décision. Les sciences comportementales permettent de mieux comprendre ce qui freine ou favorise ces changements. On a tendance à penser qu’il suffit d’informer les employés sur les bonnes pratiques pour les convaincre de changer, mais les études montrent que l’information seule ne suffit pas, surtout lorsque des barrières contextuelles ou sociales sont présentes. Par exemple, pour encourager l’utilisation du vélo plutôt que de la voiture, expliquer les avantages du vélo est important, mais ne suffit pas si, par exemple, les employés n’ont pas de parking sécurisé ou si leurs collègues continuent à utiliser la voiture. Les sciences comportementales aident à identifier ces barrières et à proposer des solutions concrètes, comme améliorer les infrastructures ou encourager une culture d’entreprise plus favorable à ces comportements.
Quels sont les défis les plus courants auxquels les entreprises sont confrontées lorsqu’elles tentent de sensibiliser et d’intégrer des comportements respectueux de l’environnement parmi leurs employés ?
Un projet récent auprès d’entreprises certifiées B Corp a mis en lumière plusieurs barrières à l’engagement des employés en matière de durabilité. Parmi les barrières contextuelles, on trouve une communication insuffisante sur la mission et les valeurs de l’entreprise, un manque de formation appropriée et un temps limité à dédier aux initiatives durables. Sur le plan social, l’absence de reconnaissance des efforts individuels et le manque d’exemplarité de la part des dirigeants freinent aussi l’engagement. Enfin, au niveau individuel, certains employés ne perçoivent pas l’impact de leurs actions ou ne se sentent pas concernés par ces enjeux. Bien entendu, ces observations sont spécifiques au projet en question et chaque organisation doit identifier ses propres défis pour engager ses employés dans des pratiques durables.
Pourquoi est-il crucial que l’ensemble de l’entreprise, du cadre supérieur aux employés, soit embarqué dans cette aventure ?
Souvent, les initiatives durables sont limitées au département RSE, ce qui peut freiner leur adoption par l’ensemble de l’entreprise. Pourtant, la durabilité doit être une priorité partagée par tous, y compris par le haut de la hiérarchie. C’est pourquoi l’implication des cadres supérieurs est cruciale : ils doivent soutenir activement ces initiatives et donner l’exemple. Lorsqu’un cadre supérieur n’adopte pas lui-même des pratiques durables, il envoie le message que ce n’est pas une priorité, même si son discours dit le contraire.
Quels conseils donneriez-vous aux entreprises qui souhaitent commencer à utiliser les sciences comportementales pour améliorer l’engagement de leurs employés dans les initiatives durables ?
Je leur conseille de s’appuyer sur des recherches scientifiques, d’écouter leurs employés et de se méfier des idées reçues. Il est facile de croire que l’on connaît la meilleure solution, mais les comportements humains sont complexes et influencés par de nombreux facteurs. S’appuyer sur des données probantes et rester attentif aux besoins des employés est essentiel pour créer des initiatives efficaces.
Pour conclure, pouvez-vous partager votre vision sur l’évolution du rôle des employés dans la transition vers des pratiques d’entreprise plus durables, et comment la science comportementale peut transformer cette dynamique ?
L’engagement des employés est essentiel, mais il doit être soutenu par un leadership clair et des changements structurels concrets au sein de l’entreprise. Les sciences comportementales peuvent renforcer cet engagement à condition que la direction y croit vraiment et crée les conditions nécessaires pour que cet engagement soit durable et efficace. La bonne nouvelle, c’est que les nouvelles générations qui arrivent sur le marché du travail sont déjà très sensibilisées aux enjeux environnementaux. Elles sont prêtes à impulser des changements et je pense qu’elles deviendront de véritables moteurs de transformation au sein des organisations dans les années à venir.
Interview avec Julia Terlet, Co-founder & Behaviour Change Director.
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